La Retirada espagnole dans le Roussillon

Le 31/10/2017 à 22:33

Dans Archives Régions

Weekend sur les routes et chemins parcourus par les exilés espagnols fuyant la guerre civile. Depuis les cols frontaliers, les chemins muletiers ou les routes ouvertes  qui menèrent aux nombreux camps dont notre région porte encore des traces et où figurent les mémoriaux modernes dressés contre l’oubli.

Résumé par Thibaud CARTERY  

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Nous nous extirpâmes de bonne heure de l'agglo Toulousaine grâce à 20 minutes d’autoroute cap au levant et le soleil sous le front. Premier arrêt, et un avant-goût des émotions du week-end, face à l'ancien camp de concentration de Bram près de Carcassonne

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Ensuite traversée du Razès cher au regretté Philippe Noiret, ses cyprès, ses collines mêlant vignes et céréales, et de Limoux mais sans sa blanquette.  On tourna à à gauche juste avant Quillan pour grimper au Col de St Louis et  découvrir par surprise dans un lacet sûrement défait  35 tonnes qui déboulaient évitant ainsi la route principale et  le défilé de Pierre-Lys avec ses passages sous roche, mais pas des motards s’entraînant au déhanché extérieur. On faillit frôler la catastrophe à deux reprises, mais los angeles ( angels pour les bikers) veillaient et les valises bmw  étaient solides ! De l'autre coté du col un choc de couleurs expressionnistes après le contre jour saturé de l’autoroute: encadrés par un viaduc  l'ocre des Fenouillèdes , le vert de chênes verts et le bleu de la Méditerranée

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Plus tard après Estagel et Thuir, restera encore dans notre souvenir une descente magique sur Céret et ses toits cubistes façon Picasso: par la D615 depuis le col de Llauro en passant près de l'ermitage de St Férréol et en finissant par une bonne bière autour d'un casse croûte  sous les platanes légendaires qui ceinturent la belle église St Pierre

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… où chacun mit discrètement un cierge augurant de routes plus difficiles encore en passant les Pyrénées.

Le col du Perthus  nous mena au village de La Junquera doté d'un musée de l'exil, moderne et très bien documenté sur la période de la guerre civile et du totalitarisme en Europe

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Nous rempruntâmes ensuite comme les républicains de 39 la route de montagne vers la France et la liberté croyaient-ils. De l'autre coté du Col marquant le passage, nous attendaient en embuscade des  Banyuls hors d'âge (Rancio) ou de la même époque au moins, pour une dégustation au Domaine de Vial-Magnères et nous fîmes preuve de bravoure comme en atteste la photo suivante.

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Le lendemain matin la pression du casque et la marque de la jugulaire oubliés, nous nous réveillâmes devant la mer

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comme lavés des infamies traversées. Ce n'était que partie remise:  face à Cerbère

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le col des Balîtres a laissé de terribles souvenirs à des dizaines de milliers d'espagnols bloqués pendant des jours par l'incurie des français. Port Bou a consacré un beau mémorial au destin tragique de Walter Benjamin

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Heureusement à St Laurent de la Salanque, face à l'église, Jérémie en sa poissonnerie nous prit dans ses filets et nous régala de sa pêche du matin: sardines, couteaux, dorades à la plancha et moules rôties valaient bien une messe dominicale.

A demi pardonnés du péché de gourmandise si peu prémédité, nous allions définitivement expier notre faute collective au Mémorial de Rivesaltes, par notre choix de cette oeuvre en béton moderne de l'architecte Rudy Riciotti: un cube à demi enterré de 20 mètres par 200, au milieu de baraques militaires à demi écroulées, dans le plus grand camp militaire d'Europe ! Puis en écoutant jusqu'au bout la litanie égrenée par notre guide des populations européennes et africaines que l'Etat français parqua sans humanité dans ces lieux volontairement dénudés et ce jusqu’en 2007 ! Pour une fois que la moto nous faisait traverser notre propre histoire on s'en souviendra à deux fois des lieux de mémoire !

Thibaud CARTERY

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